Pierre Tournisse DessinLa Pierre qui tourne sur elle-même

« Elle doit son nom à une légende qui raconte qu’elle tourne trois fois sur elle-même à Noël lorsque les cloches de l’église de Torfou égrènent les douze coups de minuit, et elle prend son bain dans le ruisseau.

 

Par contre elle est très exigeante . . . le nuit doit être sans lune, et personne ne doit suivre ses ébats dans l’eau fraîche du Bon-Débit, alors pas de rôdeurs dans les environs !

Le matin de Noël, elle est réinstallée sur son rocher, sur la même assise étroite. »

 

La Pierre qui enfante . . .

« On rapporte qu’à l’intérieur de cette pierre, se trouvent tous les enfants qui naîtront dans l’année au village, et, chaque jour elle descend au ruisseau pour leur donner à boire. »

Pierre Tournisse Carte Postale 2Dans le « Glossaire étymologique et historique des patois et des parlers de l’Anjou(1908) », Verrier et Onillon* développent cette légende de façon savoureuse :

« A Torfou, c’est la pierre Tournisse qui est la pierre d’achoppement pour les indiscrètes curiosités de la jeunesse ingénue. Tous les indigènes de Torfou sont de la Pierre Tournisse, et c’est là que la bonne femme va les chercher, contre rémunération honnête, bien entendu. Elle n’a pas du reste, à s’en occuper autrement. La Pierre Tournisse prend soin elle-même des nourrissons qu’elle porte dans ses flancs et, chaque jour, elle descend au ruisseau voisin pour les faire boire !

Il n’est pas rare que des galopins passent des journées entières à guetter le moment où le phénomène se produira. Malheureusement pour ces saints Thomas candides, la granitique mère Gigagne de Torfou, toute Tournisse qu’elle soit, n’est que la grande sœur de maintes bornes connues à Montjean et ailleurs, qui font le tour du champ toutes les fois qu’elles entendent midi sonner . . . /. . . Il y a quelques années, l’état a dû la classer d’urgence comme monument historique ; des carriers étaient en train de la débiter en moellons, et l’on voit auprès des morceaux énormes qu’ils ont fait sauter à coups de barres de mine ! S’ils savaient se servir de la poudre, ils ne l’avaient assurément pas inventée, ces vandales ! Mais en somme, l’ignorance et le besoin d’argent excusent de tels actes, et peut-être les pitoyables artistes voulaient- ils simplement délivrer leurs petits frères, les innocents renfermés dans la Pierre Tournisse »

*R. Onillon est bien connu au Longeron puisqu’il y était instituteur durant de nombreuses années au début du XXème siècle.

 

L’origine de Torfou dans la Pierre Tournisse . . .

Pierre Tournisse Dessin 1Pierre Le Cour dans la revue Mercure de France (1890) explique que l’origine du nom Torfou prend ses racines dans la Pierre Tournisse. En effet, l’auteur découvre un beau jour la Pierre Tournisse. Après avoir constaté que les formes creusées sur le dessus de la pierre n’affectent point la forme d’un corps humain. Pour lui l’intérêt de ce monolithe réside dans le fait que sa face ouest présente un aplatissement vertical en forme de cœur au sommet de laquelle aboutit la principale des rigoles d’écoulement venant du sommet. Et il ajoute plus loin d’ailleurs, ne peut on trouver une autre preuve qu’il s’agit bien d’un cœur jouant un rôle religieux de premier ordre par l’étymologie même du nom du lieu où il se trou ve : Torfou ?N’est il pas probable en effet que Torfou, c’est Corfou, par permutation de la première lettre C en T ? Et l’auteur de donner d’autres exemples de permutation de caractères, d’assimiler la forme du Tau des hébreux au Chi grec. Il poursuit ainsi : « Mais Corfou ne serait-ce pas Cor-phos, cœur de lumière, cœur lumineux, cœur rayonnant ? . . . De plus la qualification de Tournisse donnée à cette pierre, comparée ainsi à un tourniquet, me paraît correspondre, nn à l’idée de trouner, mais à celle renfermée dans Cour-nik(même permutation du C en T) que l’on trouvera ci-après au sujet du mot Carnac » . . .

Et on finit dans une allégorie pour le moins sanglante :  « Que l’on s’imagine maintenant ce spectacle capable d’inspirer un poète ou un peintre : le sacrificateur debout au lever du soleil sur le bloc branlant qui domine la colline, et la foule des spectateurs assemblés jusqu’au fond de l’horizon voyant peu à peu le cœur gigantesque s’empourprer par le sans que lui amène la rigole d’écoulement, tandis que le soleil monte lentement au milieu des nuages rouges eux-mêmes et s’élève, telle une hostie giganteque, au-dessus du sacrificateur et de sa victime, réalisant ainsi une symphonie sanglante, effroyable et hautement symbolique en même temps »

 

Texte intégral : http://gallica.bnf.fr/Mercure de France 1890 Tournisse